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Titre de la source : Echanges sexuels monétarisés, femmes et feminités au Maroc : une autonomie ambivalenteAuteur(s) : Mériam Cheikh, doctorante en anthropologie, Université Libre de Bruxelles et Université de Provence
Éditeur(s) : Université Libre de Bruxelles et Université de Provence (12 pages)
Pays d'édition : Maroc
Année : 2009
Echanges sexuels monétarisés, femmes et feminités au Maroc: une autonomie ambivalente (PDF, 211 Ko)
Au Maroc, chaque nouvelle génération de femmes et d’hommes apprend que son destin sexuel, encore étroitement lié à la procréation, doit s’assumer dans le cadre matrimonial. Pourtant on constate depuis trois décennies que le déclin spectaculaire du mariage des jeunes vient enrayer les mécanismes de reproduction des arrangements sexuels traditionnels. Comment les nouvelles générations peuvent-elles assumer leur devenir sexuel dans un tel contexte ? Elles l’assument en se distanciant de la rigidité d’une éthique sexuelle centrée autour du mariage et de la procréation.
Réalisée auprès de plusieurs femmes colocataires et célibataires qui vivent et travaillent dans deux grandes villes du pays, l’anthropologue Mériam Cheikhn, qui travaille sur « l’économie intime » au Maroc, s’interroge sur les rapports femmes-hommes tels que vécus et perçus au Maroc. « Éloignée du cadre familial, cette forme d’habitat que j’ai partagée à Casablanca (en mai 2007), et à Tanger (en mai 2008), d’une part, permet aux femmes de se mettre temporairement à distance des attentes de rôles et de se tourner vers des pratiques transgressives et, d’autre part, participe d’une relative mobilité sociale. »
Âgées entre 17 et 39 ans, ces femmes travaillent simultanément dans la prostitution, la restauration et la domesticité et entretiennent, en même temps, des rapports intimes avec des hommes. « Certains échanges monétarisés sont pour certaines de mes colocataires un moyen supplémentaire d’accéder à des ressources. Dans un contexte de précarité économique, entre mariage et travail, ces échanges et intimités monétarisées constituent une alternative temporaire à la réalisation féminine. (…) Ces rapports sexuels hors mariage peuvent certes prendre la forme d’une prostitution professionnelle en bonne et due forme (avec négociation de la durée, nature et tarif de l’échange), mais peuvent également être des relations d’amours monétarisées où le tarif est un don. ».
Au delà de l’aspect économique du phénomène, l’auteure analyse que la vision de ces femmes célibataires n’est pas différente de celle des femmes mariées en ce qui concerne les rôles sexués : « Ces relations monétarisées semblent s’accorder à l’idéologie dominante des rapports entre les sexes au Maroc où figure l’idée de l’aide masculine apportée aux femmes, transmise et assimilée au cours de la socialisation des jeunes. ».
Les colocataires vivent une sexualité dans l’ombre qui leur permet de gagner leur vie, d’aider leurs familles et d’inventer, peut-être, de nouvelles manières d’être. « Ces jeunes urbaines, émigrées vivant séparées de leurs familles et alliant travail et relations intimes monétarisées esquissent d’autres manières de vivre féminines. En d’autres termes, seraient-elles les actrices d’une fabrication d’autres identités sexuelles ? ».
Sommaire
Introduction
Argent et sexe : pratique banale ou déviante?
L’espace social de la colocation: une autre idée du féminin
Relation monetarisées : trajectoires et pratiques de certaines colocataires
L’Europe: prolongement de la colocation
Être une fille ou être une femme : ambivalences identitaires
Féminités en concurrence, femme première, femmes non liées
Quête de stabilité et d’honneur
Conclusion
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