Ressource
Titre de la source : Un jour, le silence a éclaté ! En lutte contre le harcèlement sexuel !Éditeur(s) : Commission nationale des femmes travailleuses de l’Union générale des travailleurs algériens (CNFT-UGTA)
Pays d'édition : Algérie
Année : 2011
Un jour, le silence a éclaté ! En lutte contre le harcèlement sexuel ! (PDF, 7,9 Mo, 96 p. )
Attouchements, mots obscènes, remarques très insistantes… Début 2015, une loi pénalisant le harcèlement sexuel dans les espaces publics est entrée en vigueur en Algérie. Quelles sont les conditions qui en ont favorisé l’adoption ? Le problème du harcèlement sexuel est profond en Algérie (comme dans de nombreux autres pays, aux Nords et aux Suds), et cette avancée juridique constitue une étape-clé dans la reconnaissance des victimes et la condamnation des agresseurs. Elle est le résultat d’une mobilisation importante, depuis les années 2000, des secteurs associatif et syndical.
La présente brochure a été réalisée en 2011 par la commission nationale des femmes travailleuses de l’Union générale des travailleurs algériens (CNFT-UGTA), en vue de soutenir une campagne de lutte contre le harcèlement sexuel en Algérie. Elle fait également office de document méthodologique.
Voici donc un récit de l’expérience de la commission nationale des femmes travailleuses, qui présente quelques uns de leurs documents de travail essentiels, lesquels pourront inspirer d’autres expériences.
Sommaire :
Partie I. Aux origines de la campagne
Partie II. Les étapes de la campagne
Partie III. L’aventure du centre d’aide et d’écoute
Partie IV. Ce que nous avons appris
Conclusion
Annexes
– Document 1 : Brochure sur le harcèlement sexuel à l’usage des travailleuses.
– Document 2 : Guide syndical contre le harcèlement produit par la CNFT.
Introduction :
« La campagne contre le harcèlement sexuel de la CNFT – UGTA (Commission nationale des Femmes Travailleuses de l’Union Générale des Travailleurs Algériens) est un exemple de lutte fructueuse, dans le contexte historique des années 2000 (…)
Au carrefour du syndicalisme et du féminisme, cette campagne tonitruante a d’abord brisé un tabou. Et quel tabou ! Car vaincre le tabou du harcèlement sexuel imposait de parler de sexualité dans un contexte de régression traditionnaliste. Cet objectif semblait inaccessible, surtout après la vague rétrograde des années 1990.
Depuis, le regard de la société a changé. Alors qu’il accablait les victimes, il se révolte, depuis, contre les harceleurs et se montre solidaire des victimes. Pour ceux qui l’auraient oublié, rappelons l’isolement d’une femme agressée dans un bus et les fanfaronnades de l’agresseur impudique. C’est une victoire immense qui a changé les rapports de force.
Nous n’avons certes pas aboli le patriarcat ni l’oppression des femmes mais, désormais, le harceleur craint la publicité. Il craint une réprobation désormais unanime.
Nous n’avons pas encore fait reculer les emplois précaires et la précarité sociale. Nous n’avons pas encore réussi à inverser la tendance à mettre le travailleur et la travailleuse en situation d’insécurité permanente. Au contraire, les conditions qui ont provoqué l’essor du harcèlement sexuel, c’est-à-dire la multiplication des occasions de chantage, sont toujours là.
Dans notre pays comme dans le monde, la mode est aux contrats temporaires, au travail non déclaré, à l’emploi informel. Bien sûr, nous sommes mieux armées pour nous défendre, l’opinion de l’environnement social, familial et professionnel change en notre faveur. Mais cela ne nous dispense pas de lutter pour exiger la généralisation du travail décent.
Sur le plan pratique, pour une femme qui veut se battre, les conditions demeurent très difficiles. Bien sûr, la loi a été amendée, ce qui est un acquis visible, synonyme de victoire morale et symbolique. Car la criminalisation du harcèlement sexuel par le code pénal conforte le consensus de la société contre cette violence. Cet amendement est surtout un point d’appui concret pour les victimes qui engagent des procédures. (…)
Pour nous qui avons construit la campagne et saisi le ministère de la justice, cet amendement du code pénal est une récompense inouïe. Plus tard, une grande ONG américaine s’est mise à enseigner les étapes de notre expérience comme la méthodologie recommandée pour une campagne de plaidoyer. (…)
La campagne sur le harcèlement sexuel a pointé du doigt la question du respect de la femme travailleuse et contribué ainsi à légitimer le travail féminin. Mais, bien au-delà de son objet déclaré, cette campagne a été le drapeau, le repère de toutes les aspirations des travailleuses et notamment de l’exigence d’un égal accès des femmes à la responsabilité professionnelle.
Elle a accompagné une mutation, un réajustement en cours des mentalités et des pratiques sociales pour passer de l’Algérie des années 60 et 70 où 97% des femmes étaient au foyer, à l’Algérie actuelle qui semble progresser vers une parité inéluctable dans tous les compartiments de la vie publique, malgré le poids des traditions et la persistance des idées venues d’un ordre social en cours d’abolition.
Les progrès sont réels mais le chemin est encore long. Plusieurs générations devront continuer ce chantier essentiel. Cette modeste brochure propose un récit de cette expérience et présente quelques uns de nos documents de travail essentiels qui pourront inspirer d’autres expériences. »
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